Qui était Emilien Dumas, bienfaiteur du Muséum de Nîmes ?

“Emilien Dumas était un précurseur. Il s’approche de la théorie de l’évolution près de 30 ans avant que Darwin ne l’exprime !” Quand Adeline Rouilly, directrice du Museum d'histoire naturelle et Préhistoire de Nîmes évoque le scientifique gardois, ses yeux pétillent. Il faut dire que ce Sommiérois, né en 1804 dans une riche famille de propriétaires agricoles, a largement contribué à l’essor du Museum nîmois. Il laisse près de 20 000 minéraux et fossiles et 4 000 ouvrages scientifiques au musée. Une immense collection rassemblée dans une salle qui lui est dédiée, le tout regroupé dans une magnifique bibliothèque en bois, avec plusieurs centaines de tiroirs, créée sur-mesure par un ingénieur de la Ville de Nîmes. “Il a fallu 15 jours en calèche pour transporter ses échantillons entre Sommières et Nîmes”, précise la directrice du Museum. 

Vers 1825, après des études en Suisse, où il développe une passion pour la géologie, il suit les cours du plus grand paléontologue de l’époque, Georges Cuvier (1769-1832) au Museum de Paris. Quelques années plus tard, c’est dans sa région natale qu’Emilien Dumas fait sa première grande découverte paléontologique dans la grotte de Pondres, près de Sommières. Il y découvre la présence d'ossements d'espèces disparues, comme l'ours ou la hyène des cavernes. Des restes d'animaux qui côtoient des ossements humains et des silex et poteries. Emilien Dumas suppose alors que l'Homme aurait été contemporain de ces espèces disparues. Il s'approche donc ainsi de la théorie de l'Évolution qui sera exprimée par Darwin bien plus tard, en 1859. Une idée en contradiction avec la théorie acceptée de l’époque, celle du fixisme, qui affirmait qu’il n’y avait pas de transformation des espèces végétales ou animales ni d'évolution de l'Univers depuis sa création. Elle suppose que le monde dans lequel l'Homme vit est stable. Une théorie qui fut construite avec des croyances religieuses et aujourd’hui totalement rejetée par les scientifiques. 

Géologue, géographe, hydrographe, paléontologue, archéologue, botaniste, le Gardois Émilien Dumas était un touche-à-tout comme les érudits de son siècle. Son autre exploit est d’avoir parcouru pendant près de 20 ans le Gard pour réaliser une carte géologique de notre département en établissant 2000 points d’altitude. Un vrai travail de titan. Émilien Dumas recense aussi une vingtaine dolmens de qu’il a rencontrés dans 13 communes du Gard, dont celle de Blandas. 
Ce collectionneur frénétique, passionné aussi par le théâtre et vulgarisateur de la science, meurt d'un anthrax (maladie du charbon) à Ax-les-Thermes (en Ariège) le 21 septembre 1870, après l'incendie de la bibliothèque de Strasbourg qui l'avait profondément affecté. Le scientifique repose chez lui à Sommières.