Qui étaient les Castors, bâtisseurs du quartier Beausoleil à Nîmes ?
Patrimoine
Samedi 5 octobre, la Ville de Nîmes rebaptise le jardin à l’angle de la rue de Barcelone et de la rue Ernest-Bruxelles du nom de “Castors cheminots mutualistes”. Un hommage à ce mouvement unique dans l’histoire d’après-guerre.
Dans les années 50, la France fait face à une crise majeure du logement. Les destructions causées par la Seconde Guerre mondiale, combinées à un manque de ressources et à un besoin de logement important, rendent la situation particulièrement difficile. Plus de 700 000 familles se retrouvent dans des habitations vétustes. Face à l’urgence, le mouvement des “Castors” va prendre vie un peu partout en France. Il regroupe des hommes qui vont eux-mêmes assurer la construction de leur maison. À Nîmes, les “Castors cheminots mutualistes” vont se distinguer par leur engagement dans la construction. de leur propre quartier, celui de Beausoleil.
A Nîmes, les Castors étaient en majorité des cheminots
“Si au niveau national, les Castors étaient fonctionnaires, postiers, instituteurs… à Nîmes, ils étaient en grande majorité des cheminots”, expliquent Christiane Roux et Bernard Acarie du comité de quartier Beausoleil qui ont passé plus d’un an à retracer l’histoire de ce mouvement, en récoltant les témoignages de descendants de Castors et en s’immergeant dans les archives locales et nationales. “Les cheminots nîmois vivaient dans des conditions très dures. À Courbessac, par exemple, certains habitaient dans des wagons sans eau ni électricité. Ils vont alors se regrouper pour acheter ensemble des terrains et construire leurs habitats. Ainsi va naître le quartier Beausoleil. C’est d’ailleurs eux qui vont choisir ce nom.”
L’esprit était à la solidarité, surtout chez les cheminots
Environ 300 “Castors” vont alors créer 300 maisons entre 1951 et la fin des années 50 à travers quatre lotissements. Le premier sort de terre rue de Barcelone et place de la Mutualité. Le 2e lotissement, lui, bénéficiera d’une inauguration officielle rue Ernest-Bruxelles en avril 1954. “Tous étaient membres des Castors mutualistes cheminots et tous s’étaient regroupés pour s’entraider. À l’époque, l’esprit était à la solidarité, surtout chez les cheminots. Sur des terrains acquis en commun dans le quartier Beausoleil, les Castors cheminots se lancent dans une entreprise ambitieuse : l’ouverture des rues, la création de réseaux d’eau et d’électricité. Pendant plusieurs années, week-ends et jours fériés sont consacrés à ces chantiers communautaires où chaque membre apporte sa contribution”, continuent Christiane Roux et Bernard Acarie. Des personnalités nîmoises comme Raymond Dizier, Aimé Longuet, Émile Michel ou Frank Pic vont marquer ce mouvement.
Auto-construction dans le quartier Beausoleil
Aujourd’hui, le quartier Beausoleil à Nîmes garde encore des traces de cette aventure humaine et collective. Si la plupart des habitations ont été rénovées ou modernisées au fil des décennies, l’esprit des Castors, celui de la solidarité et de l’auto-construction, reste vivace dans la mémoire locale. Les Castors cheminots ont non seulement bâti des maisons, mais aussi un esprit communautaire, une solidarité active et une mémoire commune. Le mouvement s’arrête dans les années 60 avec la création des Zup et de leurs grands ensembles.
Un jardin rebaptisé
Samedi 5 octobre en fin de matinée, la Ville a posé une plaque, à l’angle des rues Barcelone et Bruxelles, annonçant la dénomination officielle du Jardin des Castors cheminots mutualistes nîmois. “Ce jardin est la célébration de l’histoire unique de ce quartier qui a marqué un véritable tournant dans la vie mutualiste en France. Un véritable changement de vie donnait naissance à une communauté unie et solidaire”, a déclaré Chantal May, Adjointe déléguée à la Végétalisation, aux Parcs et jardins et aux Jardins partagés accompagnée de Jean-Marie Habouzit, président du comité de quartier Beausoleil.